Ils écrivent comme ils parlent. Ils écrivent vite. Sautent l’une ou l’autre voyelle. Ils ont moins de 25 ans, l’avenir n’est pas aussi radieux que ne le laissent croire les opérateurs mobiles. Les jeunes usent du SMS et abusent (de) la langue française. Attention, danger.

C’est à la fin des années 90 que l’interconnexion entre les opérateurs de téléphonie mobile a propulsé le SMS au rang de moyen de communication à grande échelle.

Les SMS sont une mine d’or, à n’en pas douter : facturés à des tarifs trop élevés par rapport à leur coût de production, ils assurent des revenus colossaux aux opérateurs. La facture est encore plus salée dans le cas des MMS, lesquels, pourtant, transitent par un réseau GPRS ou 3G ne justifiant pas vraiment un coût de 50 centimes d’euro.

En France, ce sont près de 15 milliards de SMS qui ont été échangés l’an dernier. S’ils sont peu utilisés par les adultes aux Etats-Unis et l’apanage des jeunes, ils sont plus largement répandus dans toutes les tranches d’âge en Europe, avec toutefois une proportion plus élevée chez les 15/25 ans.

Oui mais voilà, rédigés dans un train, un bus, en marchant, pressés et pressants, ces messages violent bien souvent les règles les plus élémentaires de l’orthographe et de la grammaire. Limités à 160 caractères, ils obligent à une telle concision qu’ils ont donné naissance à une nouvelle langue : le langage SMS. Ce phénomène linguistique, imagé et coloré, se retrouve désormais sur des affiches – ce qui n’est pas si grave -, sur des cartes postales et, malheureusement, sur des copies d’examens et des lettres de motivation.

Question : le portable est-il l’instrument de l’abrutissement des masses sous couvert de moyen de communication moderne ? Sommes-nous si pressés que nous avons échappé à une révolution culturelle – et commerciale – majeure depuis à peine dix ans ? Nous – qui avons 25, 30, 40 ans – avons pourtant longtemps vécu sans lui, sans ce satané téléphone portable. Et très bien même ! Il nous arrivait de laisser un mot sur la table, sur la porte, sur un tableau, de parler au téléphone, parfois.

Les jeunes retournent à l’écrit, nous assurent nombre de linguistes. Tant mieux si les SMS et les (Sky)blogs sont aujourd’hui les instruments d’une nouvelle génération d’écrivains, mais n’est-il pas également utile de se demander si le SMS n’est pas finalement un moyen aisé de détourner l’attention d’une orthographe pénibe et, plus généralement, d’une piètre maîtrise de la syntaxe ?

A encourager – opérateurs, constructeurs, marques commerciales – la régression orthographique, ne s’attaque-t-on pas finalement aussi à la structuration intellectuelle de l’individu ? « Une boîte de six » (j’évite l’orthographe SMS à dessein) pour qualifier un camion de police, c’est finalement le triomphe de MacDonald’s sur la racine grecque ou latine d’un terme français.

A moins que nous ne souhaitons Diam’s comme futur(e) Ministre de la Culture, il convient d’avoir la sagesse de ne pas céder à la pénétration du SMS dans le cursus scolaire.

Servum Pecus, jamais !