L’état de libéralisation du marché des télécoms belges est une farce : nous le savons déjà. Des oligopoles se forment sous le regard impassible du pouvoir politique. Malgré des baisses de coût imposées en novembre dernier par l’IBPT, BELTUG, l’association des utilisateurs professionnels des télécommunications en Belgique, somme les opérateurs fixes de baisser le prix des communications vers les réseaux de téléphonie mobile, ce qu’ils refusent de faire. Et il serait dommage que cet appel reste lettre morte.

Vous l’ignorez peut-être mais, depuis le 1er novembre, l’IBPT – la très laxiste « police » des télécoms belges – a forcé une diminution du prix des appels vers les mobiles : une transposition d’un cadre réglementaire européen vieux de… deux ans. Depuis cette date, les opérateur (fixes et mobiles) paient 20 % de moins pour la terminaison des communications vers les opérateurs mobiles. Cette première vague de diminution sera suivie par une seconde baisse d’environ 20 % en mai 2007 pour atteindre 50 % (2 x 20 % puis 10 %) en novembre 2008.

Cette terminaison est cruciale. D’un côté, elle assure des revenus nécessaires aux opérateurs. De l’autre, elle détermine le prix plancher des communications, ce qui « explique » les différences phénoménales de coût de communication entre, par exemple, une ligne fixe à Hong Kong (5 centimes la minute) et un mobile Proximus (14 centimes la minute).

Si les opérateurs mobiles ont déjà répercuté le prix de cette baisse à leurs abonnés, les opérateurs fixes semblent moins pressés. BELTUG voit rouge ! Pour Danielle Jacobs, DG de l’association : “Pour les utilisateurs, les appels de fixe à mobile représentent une dépense importante : appeler un GSM coûte nettement plus cher que de passer un appel vers un appareil fixe. Maintenant que l’autorité réglementaire intervient enfin, on constate certes une importante baisse des coûts, mais on remarque aussi qu’au jour d’aujourd’hui, ce sont en fait les opérateurs qui s’y retrouvent. Or, le but n’est pas que les opérateurs y trouvent leur compte, mais bien les utilisateurs. »

Avez-vous vraiment constaté une diminution de 20 % sur vos dernières factures de téléphone ? Peu probable. Selon une enquête menée par BELTUG auprès de ses membres, il ressort clairement que ceux-ci n’ont pratiquement bénéficié d’aucune baisse de tarifs. Argument des opérateurs : pas question de répercuter une baisse des tarifs « car les 3 opérateurs de téléphonie mobile ont interjeté appel contre la décision de l’IBPT. »

Concluons avec bon sens en reprenant une remarque de Danielle Jacobs : « Si l’autorité réglementaire intervient sur le marché en faveur des utilisateurs, son intervention doit être perceptible. »

Oui mais voilà, sans volonté politique forte, l’état de la libéralisation des télécoms en Belgique, qu’il s’agisse de téléphonie fixe, mobile, de connexion à l’Internet ou de télévision, risque de rester un long fleuve très tranquille où l’opérateur historique et dominant dicte la loi. Alors que, dans le reste de l’Europe, les prix fondent comme neige au soleil, force est de constater que tant du côté des câblo-opérateurs que des opérateurs Internet ou mobiles, la facture est très loin de diminuer. Comprenne qui pourra : un marché sainement libéralisé peut-il accepter une augmentation du prix de l’aDSL chez Belgacom ? Un marché sainement libéralisé peut-il longtemps encore voir le prix des SMS osciller entre 10 et 15 centimes, plusieurs fois son coût réel ? Que fait Belgacom avec son réseau ADSL2+ sinon le brider ? La 3G a-t-elle un avenir sans un regain de concurrence ? L’IBPT peut-il tolérer que les MVNO soient traités comme des courtiers sans faire pression sur les prix pour organiser une concurrence bénéfique non aux industriels mais aux consommateurs ? Et surtout, que peut donc bien faire l’IBPT – après tout, c’est son rôle ! – sans véritable moyen de pression ?