On en a lu, naguère, des pamphlets rappelant l’urgence de se conformer aux standards du web pour éviter que les développeurs ne considèrent Internet Explorer comme le seul écran des sites web. Aujourd’hui, force est de constater que la même dérive s’empare des webmasters. Leur obsession du moment ? Un site optimisé iPhone. Quitte à en oublier le reste du monde ?

C’est désormais « the place to be » : les plus grands médias – de LCI à RTLInfo.be en passant par 20Minutes, le Soir, la DH, MINT, Radio Contact, RTL France – profitent de la vague « iPhone 3G », écoulé à 4000 exemplaires en Belgique jusqu’ici, pour lancer des versions optimisées de leur site web. L’adresse est souvent simple à retenir : iphone.lejournal.domaine.

Jusqu’ici très réticents à développer des éditions mobiles, les développeurs semblent avoir trouvé une plateforme de nature à exposer leur production de manière conviviale et pertinente pour les utilisateurs. Le bon vieux temps du WAP est révolu : tant mieux.

Oui mais voilà, cette floraison de sites optimisés pour un seul terminal pose question : qui des autres systèmes d’exploitation ? Quid des autres navigateurs ? Il faut comprendre les développeurs : ils ont jusqu’ici dû faire face à un succès très mitigé chez les mobinautes. L’iPhone apporte une solution complète : un navigateur clair, évolué et capable de fédérer des lecteurs assidus. Le revers de la médaille, c’est l’utilisation de ces sites web optimisés sur d’autres mobiles. Quid du site iphone.20minutes.fr ou iphone.lesoir.be sous Netfront, Safari, Opera Mobile, Opera Mini ? Des résultats loin de l’affichage optimisé, même sur des navigateurs très respectueux des standards comme le récent Opera 9.5. Absurde.

Faut-il démultiplier les versions mobiles à l’image de grands quotidiens comme Le Soir qui scindent leurs éditions nomades en mobile.lesoir.be et iphone.lesoir.be ? S’il s’agit là d’une solution simple à mettre en place pour l’instant, il conviendrait tout de même de réfléchir à une universalité de l’affichage en fonctions d’applications strictes et standardisées des langages du web, du bon vieux HTML à Ajax. Sinon, demain, il faudra aux quotidiens une armada de développeurs pour se conformer aux exigences de tel ou tel navigateur mobile !

Evidemment, il est plus difficile aujourd’hui d’attaquer de manière frontale Mobile Safari que naguère Internet Explorer. Malgré quelques spécifications propres, Webkit respecte les standards et force les éditeurs de contenu à privilégier des formats multimédia répandus comme le MP3 et le MPEG4.

Il ne faudrait pas laisser à Mobile Safari le monopole d’Internet mobile, voire la direction des opérations, comme il a fallu retirer à Microsoft les mains du pot de confiture avec la pression de Firefox.

Il est urgent de ne pas léser les utilisateurs ou d’opérer une ségrégation en fonction du terminal utilisé. Demain, l’utilisateur du C905 de Sony Ericsson, du Samsung Omnia, du Nokia N96, doivent pouvoir accéder eux aussi dans des conditions aussi confortables à des sites web mobiles, puisque le marché, sur impulsion d’Apple, a fini par générer sinon un besoin au-moins une curiosité chez l’utilisateur. Aux constructeurs de terminaux, eux aussi, de faire leur part du travail en adoptant un navigateur sans compromis (UIQ ferait bien d’oublier Opera 8.65). Et en oubliant les formats de diffusion multimédia exotiques.

Demain, Firefox arrivera sur mobile. Demain, un nouvel Internet Explorer mobile sera proposé. Demain, le haut débit mobile permettra à chacun d’accéder à ses loisirs sur un écran réduit. Ne laissons pas la hype nous faire oublier la nécessité de l’universalité.