Lorsqu’en janvier 2007 Apple dévoile son iPhone, les yeux se tournent immanquablement vers les autres acteurs de la téléphonie mobile. Beaucoup attendaient une réponse rapide, immédiate. 18 mois après, seuls Samsung, LG et HTC ont osé se mesurer au phénomène. Les autres se posent la question de savoir s’il est utile de se battre pour un marché de niche et d’engager des moyens considérables pour faire de la figuration. Tant qu’Apple ne vendra pas de téléphones à 100 euros, l’industrie ne se sentira pas menacée. Sauf que les services que tentent de lancer Nokia et Sony Ericsson font pâle figure devant ce qu’Apple propose. Nokia qui semble résigner à attaquer les marchés émergents et baisser les prix de ses téléphones qui ne se vendent pas afin de garder coûte que coûte ses 40% de parts de marché.

Jamais un téléphone n’aura été la convoitise d’autant de consommateurs. L’iPhone est un appareil remarquable, incontestablement le téléphone mobile le mieux pensé et le plus abouti. Pourtant, les chiffres de vente ne feront pas entrer Apple dans le top 5 des constructeurs. S’il bat des records vertigineux et parfois affligeants dans le nombre d’articles produits chaque jour à sa gloire, l’iPhone n’en restera pas moins un appareil qui se vend peu. Son prix l’oblige à se tourner vers une clientèle fortunée et prompte à sortir son portefeuille pour acheter des applications, jeux et chansons. C’est certainement la principale réussite d’Apple: écraser toutes les initiatives des constructeurs traditionnels afin de s’accaparer les revenus de nouveaux services.

Quel est le meilleur baladeur musical ? Quelle est la meilleure console de jeux mobiles ? Quel est le meilleur appareil pour surfer sur le web mobile ? A ces trois questions, il ne fait nul doute que l’iPhone 3G peut revendiquer la palme. Ces trois éléments sont également les fondations d’un écosystème économique proche de la perfection. Coupler ces capacités à l’iTunes Music Store et au récent AppStore fait de l’iPhone une source de revenus décuplée. Alors que les téléphones traditionnels font encore la fortune des vendeurs SMS Premium de sonneries polyphoniques, wallpapers ou autres écrans de veille et applications Java assommantes de médiocrité.

Les lourds investissements engagés dans Nokia Music Store, Playnow ou N-Gage ressemblent, pour l’instant, à jeter les valises d’argent dans un puits sans fond. Et pour cause, si ces services sont bien pensés et fonctionnels, il leurs manque des logiciels de synchronisation PC à la hauteur et une interface mobile digne de ce nom. Si Nokia semble sur la bonne voie, on peut se demander ce que Sony Ericsson peut bien penser de son Media Manager à se mordre les doigts et son service Playnow irritant. Est-il si compliqué d’intégrer une application de gestion et d’achat de média dans le système d’exploitation du téléphone plutôt que de délivrer ces prestations via des pages web mobiles ? On peut se saluer grand maître du Walkman, il faudra encore beaucoup de travail avant de devenir disquaire. Que fait-on également chez Samsung, LG, Motorola ou HTC ? Suivre RIM et ses BlackBerry compatibles iTunes Music Store ?

L’exploit d’Apple est donc d’avoir construit le téléphone sur lequel le prix de vente n’est pas le seul revenu du constructeur. L’appareil et ses applications associées donnent entière confiance à ses utilisateurs. Assez pour qu’ils n’hésitent pas à sortir la carte de crédit. Combien de temps faudra-t-il à l’industrie mobile pour suivre ce mouvement ?