Selon l’agence nationale de sécurité sanitaire française, le manque de données scientifiques sur les ondes millimétriques appelle à une certaine prudence. Même si un faisceau de rapports et de premiers essais dévoile des constats rassurants.

Ce lundi, Proximus ne pouvait pas imaginer que le lancement de son réseau 5G allait soulever une vague de contestations. Les consommateurs belges agitent les réseaux sociaux et invitent à signer des pétitions contre son déploiement. Celle-ci récolte déjà 60.000 signatures tandis qu’une action internationale se met en place.

De 3,5 à 26 GHz

La naissance de cette inquiétude s’explique par les bandes de fréquences choisies. La 5G autorise l’exploitation de nombreux morceaux du spectre des fréquences, de 700 MHz à 26 GHz. Et notamment dans certaines bandes déjà exploitées. C’est par cette astuce que, sans licence spécifique, Proximus peut lancer la 5G en Belgique dans la bande 3G des 2,1 GHz. L’opérateur remplace simplement des antennes 3G en 5G et le tour est joué. Certes, les performances ne sont pas radicalement améliorées mais il s’agit d’une véritable 5G.

Cependant, la 5G un peu plus spectaculaire s’établira davantage dans les 3,5 GHz (3,4 — 3,8 GHz) et, ensuite, dans la zone millimétrique des 26 GHz (24,25 — 27,5 GHz). C’est dans ce secteur que la science manque davantage de données spécifiques.

Dans un rapport intermédiaire déjà très fourni, l’Anses française pose une simple question : peut-on raisonnablement étendre les nombreuses études déjà effectuées sur les ondes déjà exploitées aux 3,5 GHz ?

L’extrait de ce rapport synthétisant une bibliographie impressionnante sur le sujet :

La mise à jour de cette expertise, en 2013 (Anses 2013), avait mis en évidence, pour des expositions à des fréquences de la téléphonie mobile de 800 à 2100 MHz :

  • chez l’animal, avec des éléments de preuve limités, des effets concernant le sommeil, la fertilité masculine et les performances cognitives (amélioration des performances) ;
  • chez l’humain, avec des éléments de preuve limités, une augmentation du risque de neurinomes du nerf vestibulo-acoustique et du risque de gliome pour les utilisateurs intensifs ayant cumulé plus de 1 640 h d’exposition au téléphone mobile ;
  • chez l’humain, avec des éléments de preuve suffisants, une modification physiologique à court terme de l’activité cérébrale pendant le sommeil.

L’expertise Anses de 2016 (Anses 2016) avait mis en évidence, pour l’exposition aux fréquences de la téléphonie mobile, des effets possibles sur les fonctions cognitives d’une part et le bien-être d’autre part (ces derniers pourraient cependant être liés à l’usage des téléphones mobiles plutôt qu’aux radiofréquences qu’ils émettent).

Il ne faut pas oublier de vue que, oui, la téléphonie mobile a certains effets nocifs, notamment sur le sommeil mais également dans le cadre d’une utilisation prolongée. Dormir à côté de son téléphone ou toute autre source électromagnétique est vivement déconseillé.

Dans ces bandes de fréquence, la 5G ne changera très certainement rien à ce qui est déjà connu. Qui plus est, l’Anses ajoute que les ondes Wi-Fi entre 2,4 et 5 GHz sont déjà très présentes dans la vie quotidienne et son utilisation a déjà fait l’objet d’études très poussées, avec des conclusions similaires.

Les ondes millimétriques

La 5G ne sera vraiment une révolution que lorsque des antennes très locales et particulièrement performances seront installées. Il s’agira d’un tissu de cellules qui opéreront dans les ondes millimétriques, aux alentours des 26 GHz. A l’instar des points d’accès Wi-Fi, leur puissance sera faible mais la longueur d’onde impliquera un temps de réponse quasi nul et des débits de téléchargement incroyables.

Au-dessus de 20 GHz, les recherches à propos d’éventuels effets nocifs sur les humains se sont plus rares. Elles portent notamment sur les scanners corporels des aéroports. Cependant, cette étude américaine rejoint les premiers constats de l’Anses : les ondes ne pénètrent la peau et le globe oculaire que très superficiellement. A ce niveau de longueur d’onde, le lien entre l’émetteur et le récepteur passe difficilement un corps gorgé d’eau, ce qui est le cas de la peau. Une élévation de la température sur les tissus est palpable mais se situe sous le degré Celsius.

Toutefois, il est essentiel de reconnaître que nous manquons de données sur le long terme. Si les scanners d’aéroport sont inoffensifs, nous n’y restons que quelques secondes. Quid d’une exposition à long terme ?

Deux questions restent sans réponse actuellement :

  • À partir des données de la littérature disponibles dans les fréquences entre 20 et 60 GHz, peut-on identifier des effets sanitaires potentiels ?
  • Compte tenu des spécificités des signaux de la 5G, peut-on anticiper l’exposition des populations et son impact sanitaire ?

Les oiseaux meurent, les météorologues inquiets

Ces incertitudes sont du pain bénit pour les théoriciens du complot. Des histoires plus invraisemblables que d’autres sont régulièrement démontées mais continuent à tourner. Toutefois, il existe d’éventuels effets de bords pour les relevés météo comme l’indique cet excellent article de Les Numériques.

Certes, il est essentiel de rester éveillé et de nourrir constamment son scepticisme vis-à-vis de nouvelles technologies. Il n’est peut-être pas non plus inutile de souligner que le monde animal, les humains y compris, souffrent bien plus de la pollution de l’air et de l’eau, des pesticides et de notre gestion des déchets. En l’état actuel de nos connaissances, la 5G a bien moins d’impact sur la planète et sur notre santé que le pétrole et son utilisation.