Skype, la célèbre société éditrice du logiciel de communication VoIP du même nom, souhaite investir les téléphones portables. Les opérateurs soulèvent leurs boucliers.

Le succès phénoménal de la téléphonie par internet donne des ailes à la société qui l’a popularisée. Skype a le mérite, effectivement, de bousculer le marché des télécoms en proposant d’établir des communications gratuites via internet. Le principe est de relier de bout en bout deux clients exclusivement via le web et ainsi d’outrepasser l’utilisation des serveurs voix des opérateurs classiques. Il est donc essentiel, pour le consommateur, d’être connecté à un fournisseur d’accès à internet haut débit. En réalité, le client paye indirectement ses communications à ce FAI qui facture la quantité de données transférées. A l’heure actuelle, le logiciel qui permet l’accès à Skype a été téléchargé plus de 100 millions de fois (une moyenne d’un million d’utilisateur est connectée simultanément) et l’opérateur a servi plus de 8 milliards de minutes. Ce succès risque fortement de s’accentuer avec la popularisation d’équipements qui permettent de téléphoner directement via la prise Belgacom de façon tout à fait transparente.

Si les connexions fixes haut débit sont répandues, le constat n’est pas le même pour les télécoms mobiles. En effet, l’utilisation de la 3G reste encore marginale. Mais Skype veut être présent au moment du démarrage et propose un logiciel qui peut s’installer sur les téléphones récents et qui fait passer les communications via le GPRS, EDGE ou UMTS. Bien entendu, le débit GPRS ne permet pas une utilisation confortable mais, au lieu de s’emmêler les pinceaux dans la multitude des tarifs proposés, passer par Skype rendrait les communications gratuites. Enfin, au prix où sont les forfaits GPRS, l’avantage serait nettement moins flagrant. Mais quoi qu’il en soit, les opérateurs pourraient perdre une sacré manne d’argent en n’empochant pas les communications vocales.

Dés lors, SFR (France) a immédiatement annoncé qu’elle bloquerait tous les accès VoIP (qui sont d’ailleurs proscrits dans les conditions générales). Voilà une information qui réduit sérieusement le champ d’activité de Skype au niveau mobile si on imagine que toutes les filiales de Vodafone, par exemple, bloquent la technologie utilisée par Skype. La capacité des réseaux mobiles est sérieusement plus faible en matière d’échange de données mobiles, ce qui réduit encore les chances de succès pour Skype Mobile. Les opérateurs n’agissant que par la voie du VoIP risquent donc de ne pas avoir l’occasion de goûter au gateau cellulaire.

Néanmoins, le VoIP est une technologie de plus en plus usitée. Scarlet, par exemple, utilise la variante VoDSL. On ne compte plus les entreprises qui s’équipent. Et à la vitesse avec laquelle les capacités en matière de débit et de capacité d’échange de données, tant fixes que mobiles, progressent, il serait peu surprenant que l’emploi du VoIP ne se générale pas. Il semblerait même que, dans une dizaine d’années, la technologie classique soit rangée au musée. Les opérateurs mobiles seront certainement bien obligés d’y passer mais vraisemblablement, ils ne veulent pas laisser filer ce marché aussi facilement.